Le cnam mag' #3 - page 28

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mag'
Vu d’ici... avec Sylvie Faucheux
Relever le défi de la COP 21
nous renvoie vers un nouveau
monde qu’il reste à créer»
Derrière le défi de la COP 21 pour contenir le réchauffement global de la planète à un niveau infé-
rieur à 2° Celsius, se pose la question des solutions. Celles-ci passent notamment par l’éco-inno-
vation, pour réduire ou éviter l’impact des activités humaines sur l’environnement. Nous avons
sollicité l’expertise de Sylvie Faucheux, professeure au Cnam, sur les aspects socioéconomiques de
la transition énergétique.
Pouvez-vous nous éclairer sur ce que sont les éco-
innovations? Sont-elles toutes des innovations
responsables et durables?
L’éco-innovation responsable s’inspire du principe de
responsabilité du philosophe allemand Hans Jonas
:
«
Agis de façon que les effets de ton action soient com-
patibles avec la permanence d’une vie authentiquement
humaine sur terre
» !
Trois grandes catégories d’éco-innovations sont encou-
ragées
: les éco-innovations intégrées, radicales et la
substitution de services aux pro-
duits. Les premières visent à limi-
ter les inputs énergétiques, à
favoriser l’utilisation de matières
premières moins polluantes, la production de biens réu-
tilisables et à adopter de nouvelles méthodes de concep-
tion. Contrairement aux éco-innovations incrémentales
traitant la pollution après coup, les éco-innovations radi-
cales sont porteuses de ruptures susceptibles de chan-
ger les modes de production, de consommation et de
style de vie. La chimie verte, les
smart grid
, les véhicules
électriques en constituent des illustrations.
La dernière forme d’éco-innovation, plus connue sous le
vocable d’économie de la fonctionnalité, consiste à rem-
placer la vente d’un produit par la vente d’un usage. Les
systèmes d’auto-partage en font partie, tout comme les
services d’efficacité énergétique proposés par les
grands groupes énergétiques à leurs clients.
Toutes ces catégories d’éco-innovations se conjuguent
dans les solutions portées par la
smart city
.
Selon vous, quel rôle peut jouer la
smart city
dans la
perspective du changement climatique? Quelle
seront les mutations à prévoir sur les métiers?
Les secteurs les plus concernés par ces ruptures (dites
intelligentes) sont ceux ayant le plus d’impact en termes
d’émissions de CO
2
avec de forts enjeux sociétaux
:
transport, énergie et habitat. Rappelons que la moitié de
la population mondiale vit actuellement dans les villes
qui occupent seulement 2% de la surface de la terre.
D’ici à 2050, la proportion pourrait atteindre 75%. Or,
entre 1990 et 2010 les émissions de CO
2
ont augmenté de
45% principalement à cause de la
croissance urbaine et les villes
génèrent plus des trois quarts de
ces émissions. C’est pourquoi les
smart cities
sont susceptibles de réduire de 15 % les
émissions mondiales de gaz à effet de serre d’ici à 2020.
Mais les
smart cities
ne sauraient se réduire à de la tech-
nologie numérique. Pour être durable une ville intelli-
gente doit placer l’humain, via les services et les usages,
au cœur de ses préoccupations et d’abord répondre aux
besoins de ses citoyens en les rendant acteurs. Or, le
numérique accroît aussi les possibilités des systèmes
participatifs. C’est bien dans une telle vision de la
smart
city
que les éco-innovations, qui en sont le socle, sont
aussi responsables.
Dans quelle mesure peut-on concilier des objectifs de
compétitivité avec les principes du développement
durable?
La transition vers le développement durable peut aussi
s’interpréter comme une course économique engagée
par le biais de l’éco-innovation.
«
Une ville intelligente doit pla-
cer l’humain au cœur de ses
préoccupations
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