Le cnam mag' #3 - page 31

mag'
29
Grand angle
Bientôt un plein de salicorne
ou de pignon d’Inde pour faire
Paris-Tokyo?
L
e trafic de l’aviation commerciale qui est le secteur
le plus consommateur en
Jet Fuel
connaît une
croissance annuelle moyenne soutenue avoisinant
les 5%. Compte tenu des capacités actuelles des raffine-
ries, il est techniquement envisageable de porter à 10%
et au-delà la proportion de
Jet Fuel
issue du pétrole. Le
transport aérien représentait 2,4 milliards de passagers
en 2010 et devrait s’élever à 16 milliards en 2050. Malgré
l’attention croissante portée à la réduction des émis-
sions de gaz à effet de serre dans le secteur des trans-
ports, la complexité technologique, les contraintes
réglementaires et les impératifs économiques qui s’im-
posent aux exploitants ne sont pas aisées à résoudre. Il
n’en demeure pas moins un domaine stratégique et éco-
nomique de premier ordre puisqu’il génère actuellement
3,5% du PIB mondial.
Les carburants verts dans le transport aérien
La recherche de carburants aéronautiques de substitu-
tion est ancienne, mais a connu un regain d’intérêt à
partir de 2005, tout d’abord dans le domaine militaire
(US Air Force) puis pour l’aviation commerciale. À la
veille de COP21, il est nécessaire de s’interroger sur la
stratégie des biocarburants pour l’aviation afin de véri-
fier s’ils sont fondés ou non. Les biocarburants sont des
combustibles issus des matières végétales ou animales
non fossiles, encore appelées biomasse. Des objectifs
ambitieux en termes d’incorporation de biocarburants
et de réduction des émissions de GES sont d’actualité.
Deux principaux attraits aux biocarburants sont à rap-
peler. Le premier est la teneur souvent réduite en élé-
ment carbone et de soufre par rapport à leurs
homologues d’origine fossile et parfois sur-oxygénés, ce
qui réduit aussi les émissions de particules. D’autre part,
lors de sa croissance, la biomasse capte du CO
2
pour
grandir et en faire du carbone par le processus de photo-
synthèse, ce qui en fait une énergie renouvelable.
Il est par contre nécessaire de prendre en compte
l’échelle spatio-temporelle du cycle du carbone car l’aé-
ronautique couvre l’ensemble des échelles spatiales et
temporelles. Le voisinage des aéroports se situe plutôt
dans la micro ou la méso-échelle alors qu’en croisière, la
pollution se place sur une macro-échelle voire à l’échelle
du climat. Il faut aussi mentionner les inconvénients de
nombreux biocarburants qui ont le plus souvent un pou-
voir énergétique moindre que les combustibles usuels.
De plus, il convient de conduire pour chaque bioénergie
envisagée une analyse économique et environnementale
objective de son cycle de vie fonctionnelle.
Les biocarburants prometteurs
Différents choix se posent sur le type de matière pre-
mière a utiliser afin de produire des biokérosènes. En ce
qui concerne les agrocarburants développés pour le
routier, la communauté aéronautique a fait le constat
qu’ils ne conviennent pas : l’éthanol possède un pouvoir
calorifique de 35% inférieur à celui du
Jet Fuel
, ce qui
diminuerait de façon inadmissible le rayon d’action des
avions. Le biodiesel a quant à lui des propriétés à froid
insatisfaisantes et il se figerait aux altitudes usuelles de
vol. La recherche aéronautique voulant éviter toute com-
pétition avec la production d’aliments s’oriente entre
autres vers les plantes oléagineuses suivantes : Jatropha
Curcas (pourghère, pignon d’Inde), Camelina Sativa
(cameline), Pongamia Pinnata et Salicornia Bigelovii
(salicorne).
Afin de vérifier si les potentialités placées dans les bio-
carburants sont fondées ou non dans le secteur de l’aé-
ronautique, il faut impérativement conduire une analyse
détaillée du cycle de vie du berceau à la tombe. Une diffi-
culté majeure résulte du fait qu’elle dépend de très nom-
breux paramètres. Selon que l’on considère uniquement
les émissions de CO
2
ou qu’on les couple à celles des
autres gaz à effet de serre, les résultats peuvent passer
du positif au négatif. De plus, chaque organisme ou
société a sa méthodologie. Il convient donc d’être très
attentif à l’analyse fonctionnelle du procédé.
Aurélien Bidot & Georges Descombes
L’impact des avions de ligne, par le biais des émissions chimiques majoritaires (CO
2
, H
2
O) et minori-
taires (NOx, particules, CO…) ainsi que les nuisances sonores sont autant de problématiques que les
industriels de l’aviation s’efforcent de résoudre. Si le transport aérien représente seulement 2,5%
des émissions mondiales de CO
2
en 2015, son impact sur l’environnement est, en valeur relative,
supérieur à ses émissions de gaz à effet de serre car la majorité des émissions intervient à haute
altitude et influent directement sur la chimie atmosphérique (NOx, particules…).
Retrouvez
l’intégralité de
cet article sur
blog.cnam.fr
1...,21,22,23,24,25,26,27,28,29,30 32,33,34,35,36,37,38,39,40,41,...52
Powered by FlippingBook