le cnam mag' #2 - page 29

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avec l’apparition de ce que l’on appelle les
casual gamers
Ce joueur occasionnel n’est plus un adolescent bouton-
neux, ce peut être une petite fille qui joue avec des chiens
virtuels, une jeune femme qui fait du sport ou un papy
qui entraîne sa mémoire. Cette révolution, portée par
Nintendo, repose sur l’évolution des dispositifs d’interac-
tion. Simultanément se développait les
Massively
Multiplayers On line Games
(MMOG) dans lesquels des
milliers de joueurs peuvent se retrouver à toute heure du
jour et de la nuit dans un univers virtuel.
La combinaison des deux phénomènes a conduit aux
jeux sur les réseaux sociaux qui créent un système
d’échange, au sens marketing du terme, autour d’une
communauté. Puis, on a vu se développer les jeux sur
mobiles comme
Candy Crush
, destinés à une clientèle
qui ne sait même pas qu’elle joue à un jeu vidéo
lorsqu’elle pulvérise des bonbons dans le métro.
Les jeux géolocalisés (dans la ville ou dans un
bâtiment) et les jeux transmédias (intégré
dans la vie du joueur qui peut recevoir des
appels ou des SMS et même ren-
contrer physiquement des person-
nages du jeu) ont fini de casser les
limites temporelles, spatiales et sociales
du jeu. Parallèlement, comme pour les
autres médias, la dématérialisation des
contenus a complètement changé les
modèles économiques du jeu vidéo.
Quelles sont les nouvelles applications liées
aux jeux vidéos? Des exemples pour
l’enseignement, la formation et la recherche?
Les jeux utiles, terme que je préfère au jeux sérieux,
s’appuient soit sur les principes motivationnels, soit sur
les technologies du jeu vidéo dans un but précis.
Prenons quelques exemples de projets qui ont été déve-
loppés dans le cadre de l’équipe de recherche Medias
interactifs et mobilité (MIM) du laboratoire Cedric du
Cnam.
Jeu Serai
, issu d’un projet porté par le Cnam,
Grand angle
l’Université Paris-Ouest et la société Wizarbox est un jeu
qui, par l’observation des mécanismes de décisions, per-
met d’évaluer les intérêts professionnels du joueur.
Sherlock
, que nous développons avec la société KTM
Advance, est destiné à faire prendre conscience à un
décideur de ses biais cognitifs.
Le village aux oiseaux
est
un jeu thérapeutique basé sur le principe des jeux de tir
et qui a pour but de prétraiter la perte d’attention dans la
maladie d’Alzheimer. Enfin,
I was a Child
est un proto-
type de jeu développé par les élèves de l’Enjmin et des-
tiné à dénoncer la condition des enfants soldats.
Les exemples sont donc nombreux et extrêmement
divers. Ceci dit, il existe aussi des jeux sérieux particuliè-
rement ratés : ils sont ennuyeux et leur utilité est loin
d’être démontrée... Il faut se méfier des effets de mode
surtout quand elle est déjà passée !
Plus largement, comment voyez-vous l’avenir de
l’innovation en termes de nouveaux outils
numériques?
Comme j’ai actuellement un virus dans ma boule de cris-
tal, je ne peux pas répondre à votre question dans toute
son ampleur. Toutefois, je peux vous préciser que je
m’intéresse à toutes les applications qui relocalisent et
rematérialisent le numérique, donc les objets et les
espaces intelligents.
En 2009, Cécile Le Prado, Emmanuel Guardiola et moi-
même avions créé l’application
Transports amoureux
.
Elle permettait aux possesseurs des premiers iPhone de
laisser en des endroits précis de la ligne 3 du tramway
des messages. À l’inverse du SMS ou du tweet, tout le
monde pouvait lire et répondre à un message, mais uni-
quement à l’endroit où il était déposé. Si l’utilité directe
était de faciliter les rencontres amoureuses, les usagers
ont rapidement trouvé d’autres usages : recommanda-
tions en matière de restaurants, jeux de piste...
L’expérience a duré 15 jours et, dans cette courte
période, nous avions créé un réseau social localisé.
Depuis Cécile a créé à l’Enjmin, avec l’école d’art
EESI, un séminaire sur les jeux dans
la ville.
Autre exemple : cette année une
équipe du mas tère spécialisé
Interactive Digital Expérience
(Cnam-
Enjmin en partenariat avec Gobelins, l’école de
l’image) a créé le prototype du jeu de table
Pour
quelques poignées de ferraille
. C’est un vrai jeu de
table, avec un plateau et des petits personnages en
plastique : des chiens, des chats, des mouettes et une
super souris appelée Jazz. On joue comme sur jeu
classique en déplaçant les personnages sur le plateau.
La seule différence, c’est la tablette que l’on a placée au
centre du plateau, qui suit les mouvements des person-
nages et construit la narration du jeu. Depuis cette sou-
tenance, j’ai une souris que les élèves m’ont offerte et qui
me surveille.
Propos recueillis par Laurent Ibri
Retrouvez
l’intégralité de
l’interview de
Stéphane Natkin
sur
blog.cnam.fr
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